Anet 1er partie
(prononcé [a.nɛt]) est une commune
française située dans le département d'Eure-et-Loir,
en région Centre-Val de Loire.
Antiquité
Durant la
période gauloise, l'emplacement d'Anet faisait partie du territoire des Carnutes,
peuple qui occupait le pays compris dans les diocèses de Chartres, de Blois et
d'Orléans, tels qu'ils existaient avant 1790. Le pays des Carnutes était alors
presque entièrement couvert de forêts : Anet était compris dans la forêt
de Crothais - aujourd'hui de Dreux.
Moyen Âge
- Sous les Mérovingiens
(VIe – VIIIe siècle),
les forêts s'éclaircirent, la cité des Carnutes, plus peuplée, se divisa
en plusieurs pays (pagi) gouvernés par un comte. Les textes anciens
mentionnent comme ayant été démembrés de la cité chartraine les pays
suivants : le Pagus carnutenus (le pays chartrain),
le pagus dorcassinus (pays drouais), le pagus meduntensis (le Mantois),
le Pincerais,
le Vendômois,
le Dunois, le Perche et le Thimerais.
Aux dépens des cités de Chartres et d'Evreux se forma le pays de Madrie
(Pagus madracensis) dans lequel Anet commença à se peupler.
- Sous les Carolingiens
(VIIIe – Xe siècle), le
pays/comté de Madrie est souvent mentionné à propos des Missies
(légations instituées pour l'inspection des provinces par les Missi
dominici). Le pays de Madrie et le Maine sont réunis aux sept pays
qui formeront, un siècle plus tard, la Normandie. Après l'invasion
normande (début du Xe siècle ; 911, traité de Saint-Clair-sur-Epte),
qui enlève de fait la Normandie à l'autorité du roi de France – même si le
roi reste le suzerain suprême, le souverain théorique – et fait de la
rivière Eure une frontière naturelle, la partie occidentale de la
Madrie (vallée de l'Eure) fut incorporée à la Normandie, et la partie
orientale alla aux comtes de Vexin (aussi maîtres des
comtés de Meulan et de Dreux, et de la seigneurie châtelaine de Mantes ; mais cette dynastie comtale
s'étiole peu à peu au XIe siècle), ou encore à l'Yveline
francilienne (sous influence du roi capétien et des familles féodales des Montfort, Mauvoisin, Estavel vicomtes de Mantes, Châteauneuf, Le Riche (de Gallardon, Maule, Auneau, Lèves), Richebourg et Poissy, Montmorency et Montlhéry, Bardoul...). Mais la frontière
constituée par l'Eure n'a rien d'infranchissable ni d'intangible : au
cours des Xe – XIIe siècles,
elle ne cesse d'être mise en cause et disputée, au profit du duc de
Normandie (qui pousse vers l'est), ou bien du roi de France (qui pousse
vers l'ouest ; vainqueur final en 1203-1204 avec Philippe Auguste
ci-dessous) ; d'autant que les complicités, les allégeances
multiples, les possessions de part et d'autre de l'Eure par une même
famille seigneuriale, sont nombreuses. Ainsi la Maison comtale du Vexin
(avec ses comtés de Dreux, du Vexin français et de Meulan, plus la
seigneurie de Mantes) entre dans l'orbite normande (avec Anet sous la
domination des comtes d'Evreux : branche
naturelle de la Maison ducale). Puis le sud du
comté d'Évreux (vallée de l'Eure : Illiers, Coudres, Marcilly) est contrôlé par la Maison de Blois (par le remariage de la
duchesse de Normandie Leutgarde de Vermandois-Champagne avec
Thibaud le Tricheur vers 943), comme
le comté de Dreux (dot de Mathilde de Normandie femme d'Eudes II vers 1003) qui finalement passe
vers 1023 au roi Robert le Pieux, dont les descendants
arrondiront grandement l'escarcelle capétienne : Philippe Ier obtient le Vexin
français dès 1077 plus Mantes en 1080, et Philippe II Auguste, le comté
d'Évreux en 1200 et le comté de Meulan plus toute la Normandie en 1204.
- Anet, quant à elle, eut des
seigneurs particuliers à partir de la deuxième moitié du XIe siècle,
les Goël seigneurs d'Ivry, maîtres aussi de Bréval. Les deux petits villages initiaux de
Bréval et Anet faisaient partie d'un alleu du
domaine de Neauphlette, terres dépendant de l'abbaye de Saint-Germain et
de son avoué
le comte de Vexin (donc dans l'orbite française, capétienne et
parisienne). Mais l'affaiblissement – évoqué plus haut et finalement fatal
– du comte de Vexin et la dislocation de ses biens au XIe siècle
au bénéfice d'abord du duc de Normandie puis du roi de France, profitent
aux Goël d'Ivry, une famille dynamique, entreprenante, offensive, neuve
mais avec des racines anciennes par alliance (Robert Ier semble le
gendre d'Hugues d'Ivry ci-après), d'origine normande (très liés par
exemple à l'abbaye du Bec) mais s'activant de
part et d'autre de la rivière d'Eure : Robert Ier, d'origine
inconnue, † avant 1065, x Auberée/Aubrée dame de Grossœuvre,
probable fille naturelle d'Hugues
d'Ivry, évêque de Bayeux (remariée veuve à
Albert/Aubert de Cravent : installés à Pacy)
< Robert II, † avant 1090, actif à Bréval et Anet, x la Bienheureuse ou
Vénérable Hildeburge (III) de Gallardon,
fille d'Hervé Ier Le Riche, abbesse et
bienfaitrice de Pontoise, † 1115 < Ascelin
Goël (vers 1060-vers 1118), aussi seigneur d'Illiers et de Croth après
1112 et de Saint-André vers 1103, fondateur du
château et du bourg castral d'Anet (sa mère Hildeburge réside au château
quand elle dispose de Jouy en faveur de St-Martin de Pontoise), et
probablement des forteresses de Bréval, Guainville,
Villiers-en-Désœuvre, Breuilpont,
Grossœuvre,
x Isabelle de Breteuil fille naturelle de Guillaume et sœur
d'Eustache de Breteuil ; Guillaume et Robert frères cadets d'Ascelin
< [enfants d'Ascelin : Robert III, † vers 1123 ; Guillaume
Ier Louvel (né vers 1100-1166/1170), aussi fieffé en Angleterre (Dockings :
Norfolk, Minster Lovel(l) : Oxford), x avant 1123 Mathilde de Meulan fille du comte Robert (Maison de Beaumont-le-Roger)
et d'Elisabeth de France-Vermandois ; Roger le
Bègue sire de Grossœuvre et St-André ; plausiblement Simon (Ier)
d'Anet (compagnon d'armes de Bohémond prince de Tarente et d'Antioche à
Durazzo
et dans la Pouille ; † vers 1107 ) ; fils naturel
d'Ascelin : Robert le Roux, père de Jean et peut-être d'Hugues le
Roux d'Ivry, actif à Bréval dans le premier tiers du XIIe siècle]
< [enfants de Guillaume Louvel : Robert † vers 1150 avant son
père ; Galéran seigneur d'Ivry (< Robert IV † vers 1230...) ;
Simon (II) seigneur d'Anet, Bréval et Illiers-l'Évêque, x vers 1160
Isabelle de Maintenon sœur de Jean seigneur de Maintenon ;
Guillaume II Louvel, † 1213, hérite des fiefs anglais ;
Isabelle/Elisabeth x Richard Ier de Reviers et Néhou
seigneur de Vernon et Amfreville ; et encore : Goël,
Hélisende, Auberée † après 1209]. Simon d'Anet, en tant que seigneur de
Croth, pour préserver la forêt de Croth surexploitée par les moines du prieuré de
Croth (titulaire du droit d'usage) et leurs paysans, s'oppose au prieuré
et à sa maison-mère l'abbaye de Marmoutier : la sentence arbitrale
plutôt favorable aux moines est rendue par l'évêque de Chartres en
septembre 1185, et confirmée par le roi-duc Henri II en personne au château
d'Anet. Simon ne laisse pas de postérité survivante car ses enfants
décèdent avant lui : [< Jean sire de Bréval † 1189 ; Adam †
vers 1180 ; Auberée, † 1187 sans enfant de son x avec Yves de Vieuxpont de Courville]. Simon fonde deux commanderies templières, sans doute
celle de Chanu dans les années 1180, en tout cas celle
de Prunay en 1190. Il meurt en 1190 sans héritier
direct, et sa succession échoit au roi Philippe Auguste en 1191 (droit
d'échoite du suzerain/souverain), qui prend soin de dédommager sa sœur
Auberée et son neveu Robert IV (Avrilly
lui sera rendu).
- Anet entre donc dans la grande
histoire avec Philippe-Auguste, fils de Louis VII, roi de France, que son père
associe au trône en 1179, à l'âge de 14 ans. On trouve en effet dans les
ordonnances du Louvre des lettres de Philippe-Auguste données à Anet en
1192, la 13e année de son règne, par lesquelles il exempte
les habitants d'Anet, comme étant de sa juridiction immédiate, de tous
droits de péage et d'impôt. Puis il y réside en avril et novembre 1195.
Ses successeurs possédèrent aussi Anet, inclus dans le domaine de la
Couronne : Louis VIII, Saint-Louis, Philippe le Hardi puis sa femme Marie de Brabant († 1322 ;
son douaire à partir de 1280/85, avec Bréval, Nogent-le-Roi, Montchauvet,
Mantes, Meulan, les Mureaux). Louis le
Hutin et son frère Philippe le Long négocièrent le maintien
du douaire aux héritiers de Marie de Brabant : ainsi en 1317/1322, ce
dernier donna la châtellenie d'Anet en apanage à son oncle, Louis de France, comte d'Évreux, † 1319, fils de
Marie de Brabant. De Louis, comte d'Évreux, Anet passa à Philippe son fils
aîné, qui devint roi de Navarre sous le nom de Philippe III en 1328. Ce prince eut
pour successeur en 1343 à la seigneurie d'Anet son fils aîné, Charles II le Mauvais, comte d'Evreux, † 1387, qui devint roi de Navarre en 1349. La
seigneurie d'Anet sortit des mains de Charles, roi de Navarre, et passa à
Louis, son frère puîné, auquel il le donna en apanage avec Beaumont-le-Roger. Anet
ne resta pas longtemps entre ses mains, parce que Louis donna Anet en gage
au roi de France Charles V contre le prêt de 50 000 florins. Louis
étant mort en 1376 sans laisser d'enfant légitime, Anet revint à son frère
aîné le roi Charles II de Navarre, mais Charles V confisqua la châtellenie
d'Anet sur ce dernier (confiscation générale des biens français du Mauvais
pour complot et trahison) et fit en grande partie raser la forteresse en
1378.
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